Le quart de l’éolien terrestre menacé de démantèlement en Allemagne

La fin du soutien financier allemand aux parcs éoliens datant de plus de 20 ans signifie que ceux-ci seront sans doute démantelés à partir de 2020. Or, ces éoliennes âgées sont nombreuses et leur mise hors service pourrait être plus rapide que l’installation d’équipements neufs. De plus, les coûts de démantèlement sont élevés, certaines parties ne sont pas recyclables et la démolition des imposants socles en béton pose un sérieux casse-tête financier.

L’éolien terrestre joue un rôle important dans le mix énergétique allemand, puisque les 29 000 éoliennes du pays ont couvert près de 16 % de la production électrique en 2017. Depuis l’adoption de la loi sur les énergies renouvelables, en 2000, les exploitants d’éoliennes profitent d’un soutien leur assurant vingt ans de revenus garantis. Les équipements les plus anciens, représentant 4500 MW de puissance installée, perdront cette aide en 2020. Par la suite, de 2000 à 3000 MW d’équipements perdront chaque année l’appui financier de l’État, pour un total de près de 14 000 MW d’ici 2023.

L’électricité des éoliennes ayant perdu le soutien financier de l’État devra alors être vendue au prix du marché spot. La proportion exacte d’équipements à démanteler dépendra du prix de vente pratiqué en 2020, mais on sait que ces éoliennes anciennes sont moins efficaces et qu’elles nécessitent plus d’entretien. On prévoit donc que la plupart ne seront plus rentables et qu’elles devront être mises hors service. Si le prix du marché reste au niveau actuel, le nombre de retraits pourrait dépasser le nombre de nouvelles installations, donnant un coup de frein à cette industrie.

socle éolienne

Enjeux financiers et techniques du démantèlement

Le démantèlement de la partie aérienne d’une éolienne coûte environ 30 000 euros par MW de puissance installée, soit 60 000 euros pour une éolienne de 2 MW. Comment financer cette dépense? La plupart des exploitants, notamment les municipalités, seraient mal préparés à cette éventualité.

Une solution serait de vendre ces équipements à l’étranger pour récupérer le coût des travaux. Certains pays, notamment la Russie et diverses nations d’Europe de l’Est et du Maghreb, rachètent de vieilles éoliennes pour leurs propres besoins. Mais le marché demeure limité et l’afflux de matériel allemand pourrait largement dépasser la demande.

Même si le financement du démantèlement peut être assuré, que faire de tous les matériaux récupérés? Les parties métalliques, en acier ou en cuivre, se recyclent aisément. Mais il n’en va pas de même des pales, habituellement composées d’un mélange de fibre de verre et de fibre de carbone, liées à l’aide de résine de polyester. On ne sait pas séparer et recycler ces matières, qui pourraient s’accumuler au rythme de 16 000 tonnes par année à partir de 2021. Même leur combustion est à exclure, car les résidus obstruent les filtres des incinérateurs.

Mais ce sont peut-être les socles de béton qui sont les plus problématiques. Dans le cas d’une grande éolienne, ils peuvent faire jusqu’à 20 mètres de profondeur et représenter 3 000 tonnes de béton armé. Leur présence est un enjeu environnemental, parce que l’obstacle permet souvent à plusieurs niveaux de la nappe phréatique, normalement séparés, de se mélanger.

Le code allemand du bâtiment prévoit leur démolition complète. Mais cela serait rarement le cas en réalité, en raison des coûts de centaines de milliers d’euros reliés à cette mesure. Une pratique plus courante, et officiellement tolérée, serait de les démanteler sur les deux ou trois premiers mètres, voire sur un seul, puis de les recouvrir de terre. Mais cela n’aide pas les aquifères.

En somme, les éoliennes vieillissantes sont un problème nouveau, qui pose des problèmes de gestion du mix électrique, de finances et d’utilisation des matériaux récupérés. Il faudra peut-être songer à forcer les exploitants à mieux provisionner cette étape du cycle de vie de leur produit.

 

Source :

Abbruchstimmung in Deutschland

 

13 réflexions sur “Le quart de l’éolien terrestre menacé de démantèlement en Allemagne”

  1. C’est pareil pour le solaire : les panneaux et les batteries posent des problèmes de recyclage. Il n’y a pas d’énergie propre dans l’absolu, mais, à notre échelle de consommation, tout devient compliqué.

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    1. C l’ouragan financier de demain et personne n’était au courant pour la destruction de cette batterie d’éoliennes !
      Ca risque de souffler fort apres le brassage de l’air !

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  2. très optimiste sur le coût réel du démantèlement ! des devis sont plus proches de 400 à 600.000 euros par éolienne (selon le nombre d’éoliennes à supprimer) à la charge sans aucun doute du propriétaire du terrain !

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    1. Le problème du démontage des éoliennes n’est pas aussi insurmontable que celui du démentellement hypothétique de nos centrales nucléaires en fin de vie. J’espère que des progrès techniques permettrons de
      réutiliser les fondations en béton pour le montage de nouvelles générations d’éoliennes et dont les pales ne seraient pas plus toxiques que celles utilisées par les milliers d’ avions à hélices et hélicoptères qui nous survolent.

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      1. La réutilisation des socles n’est pas possible. Les nouvelles éoliennes exigent des socles beaucoup plus gros et comme ceux-ci doivent êtres coulées d’un seul bloc, il n’est pas possible d’élargir ceux qui existent déjà.

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  3. Une question: pourquoi n’entrevoit-on pas la possibilité d’une remise à niveau des équipements? Il y aurait des coûts, mais seraient-ils aussi élevés ou plus élevés qu’une démolition finale?

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    1. Le problème ne se situe pas seulement du côté du coût des réparations. Il s’explique aussi par le fait que le prix de vente non subventionné de l’électricité produite ne permet pas de récupérer ces coûts. Le problème ne repose donc pas principalement sur le coût des réparations, mais sur le prix trop faible payé au producteur pour son électricité.

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      1. Problème largement surestimé. Voir par exemple le cas du Danemark disposant de nombreuses installations éoliennes anciennes parfois de plus de 30 ans, produisant au prix de marché et sans subventions. Ces parcs produisent à un prix tellement bas (2 à 4 cts/kWh) que les gestionnaires de réseaux les utilisent pour les couper en cas de surproduction, participant ainsi à l’équilibre offre-demande.

        En Espagne l’éolien est désormais la source d’électricité la moins chère du pays, car de nombreux parcs sont désormais hors contrats d’achat et vendent directement au marche. Malheureusement je ne retrouve plus ma source mais elle existe. De même en Espagne le solaire est en train de repartir seulement grâce aux contrats de gré à gré, sans aucune subvention.

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  4. La destruction des pales pose le problème des composants les plus dangereux qui ont les risques chimiques des matériaux composites . Un certain nombre de ces composés sont des cancérogènes confirmés ou soupçonnés. Ils ont également d’autres effets toxiques, dont une sensibilisation cutanée et respiratoire : http://www.officiel-prevention.com/protections-collectives-organisation-ergonomie/risque-chimique/detail_dossier_CHSCT.php?rub=38&ssrub=69&dossid=557

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  5. Aucune chance de pouvoir revendre les turbines dépassées. Ne serait ce qu’à cause de la technique de démontage, qui consiste à faire tomber l’éolienne ce qui évidemment n’arrange pas la turbine. 30 000 euros par MW, c’est très optimiste, surtout pour des petites éoliennes. Reste à savoir, aussi, si les sociétés d’exploitation auraient de quoi financer cette déconstruction. En France, ce ne serait pas le cas car les sociétés d’exploitation ont été sous-capitalisées au départ et transfèrent tous leurs résultats sous forme d’intérêts, de facturations de services de façon à ne pas faire de bénéfices. Le bénéfice est fait à l’échelon des groupes et les sociétés d’exploitation seront mises en faillite.

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  6. Tout lae probléme vient des subventions, qui faussent la réalité économique de ces sources d’énergies. Sérieusement si une éolienne ancienne peut servir ailleurs, aprés démontage transport et remontage. Ne pourrait elle pas continuer à « tourner » sur place. Idem les socles de béton une nouvelle éoliénne ne peut elle pas prendre la place.( en adaptant le système de fixation, bien sur)

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    1. En pratique, un éolienne âgée exige plus d’entretien, ce qui mine sa rentabilité. Quant aux socles, leur taille est calculée en fonction de la taille de l’éolienne. Les éoliennes étant de plus en plus grosses, les anciens socles ne sont pas suffisants pour arrimer les éoliennes récentes.

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