Partager
Climat

Climato-sceptiques français : une seule nuance de cheveux gris

Quelques jours avant que Donald Trump ne nomme un climato-sceptique à la tête de l'Agence de protection de l'environnement américaine, les contempteurs du réchauffement climatiques se réunissaient à Paris pour un colloque de petite envergure, la "Contre-COP22".

3 réactions
Vincent Courtillot (à gauche) et Claude Allègre (à droite), de l'Académie des sciences, étaient à la "Contre-COP22" des climato-sceptiques.

Vincent Courtillot (à gauche) et Claude Allègre (à droite), de l'Académie des sciences, étaient à la "Contre-COP22" des climato-sceptiques, le 1er décembre 2016 à Paris.

© Sciences et Avenir

Est-ce le retour des climato-sceptiques ? Aux Etats-Unis, les portes du pouvoir leur sont ouvertes, depuis l’élection du Républicain Donald Trump à la Maison Blanche. Connu pour ses déclarations à l’emporte-pièce sur le réchauffement climatique – un « canular », selon un tweet de 2012 – le populiste a nommé Scott Pruitt à la tête de l’Agence de protection de l’environnement (EPA). Qui est Scott Pruitt ? Un élu de l’Oklahoma et "quelqu’un qui nie le réchauffement climatique et a travaillé étroitement avec l’industrie des énergies fossiles pour rendre ce pays plus dépendant à cette source énergétique", selon la réaction (également sur Twitter) de Bernie Sanders, candidat malheureux à l’investiture démocrate. De son côté, Harold Hamm, ponte de l'industrie du pétrole et pionnier de la fracturation hydraulique a jugé, sur la chaîne américaine CNCB, que Trump n'aura pas pu mieux choisir en nommant Scott Pruitt à ce poste.

Le contraste est criant avec la situation en France, en tous cas si l’on en croit la récente « Contre-COP22 » qui s’est tenue à Paris les 1er et 2 décembre 2016, et où Sciences et Avenir était présent. Sise dans les beaux quartiers de la capitale, à deux pas de la Tour Eiffel, la réunion avait de quoi faire illusion… vue de Google Map. Sur place, on ne pouvait que constater la difficulté des climato-sceptiques – qui préfèrent se désigner sous le terme de « climato-réalistes » - à remplir le petit amphithéâtre de la salle polyvalente où se tenait la conférence. Un public extrêmement homogène, âgé, blanc et masculin, au nombre d’une centaine de personnes environ, qui était venu communier dans la détestation du Giec, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, qualifiés en ces lieux de « réchauffistes », de « climato-alarmiste » voire de « climato-fanatiques ».

La faute au Soleil ?

Ainsi, les maîtres d’œuvre de la récente COP21, qui s’est conclu par la signature de l’accord de Paris en décembre 2015 ont été qualifiés de "totalement incompétents" par l’ancien minstre de l’Education nationale Claude Allègre, dans une intervention filmée la veille de la conférence et diffusée sur place. "François Hollande ne connaît pas un mot de science, Laurent Fabius n’en connaît pas davantage, Ségolène Royal, encore moins, Obama, je ne croît pas non plus". Physiquement absent mais "de tout cœur" avec les « climato-réalistes », Claude Allègre était le seul (ancien) responsable politique présent en ces lieux. Car si Nicolas Sarkozy s’était récemment lové dans leurs thèses ("Il faut être arrogant comme l’Homme pour penser que c’est nous qui avons changé le climat"), nul « lieutenant » de l’ancien président de la République ne s’est distingué ce jour-là. Il faut dire que la « Contre-COP22 » se tenait quelques jours après son échec aux primaires de la droite et sa sortie de la vie politique française.

Hors du temps, l’intervention du géophysicien Vincent Courtillot l’était également, l’Académicien des sciences s’excusant de refaire en ces lieux une ancienne présentation, dite en 2015 pendant un colloque contre la COP21. Spécialiste du géomagnétisme terrestre, il a déroulé sa théorie, selon laquelle c’est le Soleil qui est responsable des variations du climat (voir aussi encadré). Et il s’agirait de simple fluctuations, pas d’un réchauffement. Rappelons que celui-ci est pourtant avéré par le dernier rapport du Giec (2014), pour lequel des scientifiques de 195 pays ont épluché 12.000 publications scientifiques pour un document qui recense les impacts déjà observables du réchauffement climatique. Mais tout cela a-t-il de l’importance dans un débat qui, de l’aveu même de Claude Allègre, est "devenu un problème religieux" ?. "On est climato-sceptique ou climato-fanatique selon ce que l’on croit de l’influence de l’homme sur la Terre" a commenté le géochimiste. Une sorte de « post-vérité » chère à Trump et qui éclaire singulièrement la place accordée aux climato-sceptiques dans la future administration américaine. La tendance traversera-t-elle l'Atlantique ? En en juger par l'ampleur de cette "Contre-COP22", on peut parier que non.

Les approximations de Courtillot
Au cours de son intervention, Vincent Courtillot s’en est pris à « une explosion médiatique » liée à la publication d’un « rapport du WWF » selon lequel « plus de la moitié des espèces de mammifères ont disparu de la surface de la terre depuis 40 ans ». L’Académicien a alors commenté « moi je suis un spécialiste de l’extinction de la limite Crétacé Tertiaire où les dinosaures, les ammonites et bien d’autres choses ont disparu (…). Si on était à 50% comme le dit WWF on serait actuellement dans une extinction de la même magnitude que celle qui a vu disparaître les dinosaures et les ammonites. Or moi je sais pourquoi ils ont disparu, il y a eu des volcans, des quantités incroyables, en terme de gigatonnes, de CO2 et de SO2 qui ont affecté la biosphère il y a 65 millions d’années. Il est clair que nous ne sommes pas dans une phase d’extinction analogue. (…) Depuis 50 ans, sur les 4500 espèces de mammifères qui existent, il y en a 3 qui ont disparu » assène Vincent Courtillot. Bref, un sacré coup gueule. Il vient sans doute d’une mauvaise lecture de la presse qui, a l’instar de Sciences et Avenir, a relayé la fameuse étude : le WWF parle en fait de la diminution du nombre d’animaux et non pas de disparition d’espèces. Autrement dit, il y a sur Terre deux fois moins d’animaux qu’il y a cinquante ans. Et non pas deux fois moins d’espèces. La volée de bois vert a loupé son but ; c’est décidément une couleur qui sied mal à Courtillot...

 

3 réactions 3 réactions
à la une cette semaine

Centre de préférence
de vos alertes infos

Vos préférences ont bien été enregistrées.

Si vous souhaitez modifier vos centres d'intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.

Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?

Je souhaite recevoir toutes les alertes infos de la rédaction de Sciences et Avenir

Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

Santé
Nature
Archéo
Espace
Animaux
Je ne souhaite plus recevoir de notifications